C’est Alexandre Douguine, ultranationaliste, qui était visé: sa fille Daria a perdu la vie dans un attentat le 20 août
Sans doute Daria Douguina n’a-t-elle pas eu le temps de souffrir. Son père, lui, a basculé dans une tragédie : c’est à lui qu’était très probable destinés les 400 grammes de TNT, placés sous le siège conducteur du 4×4, qui ont tué la jeune femme de 29 ans. Alexandre Douguine, ideologue ultranationaliste proche du pouvoir, s’est retrouvé sur le lieu du drame quelques minutes seulement après l’explosion. Le sexagénaire aux faux airs de Rasputine avait passé la fin d’après-midi en compagnie de sa fille, jolie blonde au visage de porcelaine, dans la banlieue ouest de Moscou, à l’occasion d’un festival organized par la mouvance d’ extrême droite russe.
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Après avoir participated in a conference entitled «Tradition et histoire», which Douguine was the guest of honor, tous deux ont decided, sur les coups de 21h30, de rejoinder la capitale. At the last minute, the father chose to take another car, leaving his daughter alone behind the wheel of his Toyota Land Cruiser SUV. À quelques kilometers du musée réserve Pouchkine de Zakharovo, qu’ils envenient de quitter, le vehicule sest saudaine transformé en boule de feu.
Les auteurs de l’attentat n’ont pas complètement manqué leur target. La fusion doctrinale entre le père et la fille était becomeu telle, ces dernières années, que si Alexandre Douguine avait dû périr ce 20 août, Daria aurait sans doute repris le flambeau idéologique. Diplômée de la faculté de philosophie de l’université Lomonossov de Moscou et passée brièvement par celle de Bordeaux-Montaigne, la jeune femme marchait depuis des années dans les pas de son père. Francophone comme lui, elle partage les mêmes références idéologiques, à commencer par les philosophes chéris du régime hitlerien Carl Schmitt et Martin Heidegger, empruntant à ce dernier le concept clé de «Dasein» pour nommer le groupe de musique électronique («Dasein May Refuse» ) qu’elle avait monté durant son adolescence. Daria Douguina gérait le fonctionnement du mouvement néo-eurasiste founded by his geneteur, un courant de pensée geopolitique antiliberal faisant du monde un lieu d’affrontement entre civilizations et de la Russie le foyer d’un nationalisme et d’un conservatisme continentaux. Elle répandait dans les talk-shows des médias pro-Kremlin et ultranationalistes russes les thèses de son papa.

Le désespoir d’un père : Alexandre Douguine, impuissant, à quelques mètres de la voiture où brûle sa fille, le 20 août.
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C’est ainsi que, depuis le début de la guerre en Ukraine, le 24 février, les Douguine appelaient en choœur dans ces médias et sur l’Internet russe à écraser l’Ukraine. Alexandre continued to decline his famous declaration of 2014, at the moment of the annexation of Crimea: « Je pense que nous devrions tuer, tuer, tuer [les Ukrainiens], il ne peut y avoir d’autre discussion. » Daria, elle, qualifiait les massacres de civilians à Boutcha, au north-ouest de Kiev, par la soldieresque de son pays de «mise en scène avec les cadavres de personnes présentées comme des victimes de l’aggression russe ». Elle s’était rendue dans la ville martyre de Marioupol pour y deviser sur le sens philosophique des espaces que la Russie est en train de conquérir au prix de dizaines de milliers de morts.
Sous le vernis pseudo-philosophique des Douguine, il ya la détestation de la démocratie occidentale
Sous le vernis philosophique d’Alexandre Douguine et de sa fille, il ya en réalité un bricolage pseudo-intellectuel, «un mélimélo ideologique dont le point common est la détestation de tout ce qui ressemble de près ou de loin à la démocratie occidentale, explain le philosophe Michel Eltchaninoff, author of the book “Dans la tête de Vladimir Poutine”. Douguine a fait partie de ceux qui, dans les années 1990, ont resuscité le courant eurasiste né soixante-dix ans plus tôt au sein de l’émigration russe d’Europe, qui proclamait l’existence d’un ensemble géographique foncièrement différence du monde romano-germanique. Il prétend que la civilization russe a les moyens de s’opposer, par la violence s’il le faut, à ce qu’il considerate être la décadence du monde libéral. »
Alexandre Douguine fait partie de ces gens à qui l’on prête trop. Il est qualifié de philosophe, alors que ce fils de général du GRU (le service de renseignement militaire soviétique puis russe) a reçu une médiocre éducation supérieure, replaced by une adhésion hâtive à des groupuscules nationalistes. Comme le Cercle Youjinski de l’écrivain Youri Mamleïev (penseur de la «Russie éternelle »), le groupe de l’auteur fascisant Evgueni Golovine, ou le Parti national-bolchevique fondé avec un autre écrivain, Édouard Limonov… En 2008, nommé professeur et directeur du Center d’études conservatrices à l’université d’État de Moscou, Douguine accède enfin à l’université. Il est cependant renvoyé en 2014, sur décision du recteur de l’époque, après son appel public à « tuer» tous ceux qui committent des atrocités contre les partisans russes en Ukraine.

Le lendemain, des enquêteurs examinent les debris après l’explosion, à 40 kilometers au sud-ouest de Moscou.
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At the end of the 2000s, he became famous abroad, imposing himself as a quasi-gourou of the extreme right-wing and a leading figure of the global conservative movement. C’est dans ce contexte qu’il séduit la fringe nationaliste française, notably le philosophe et essayiste Alain de Benoist ou la famille Le Pen. Ceux-ci voient en Alexandre Douguine un homme capable de formular une critique du monde libéral-democrate et individualiste, se laissant le plus souvent aveugler au sujet des contradictions dont il est porteur, lui qui se revendique d’un fascisme social tout en étant un adversaire du prétendu nazisme ukrainien, thème essentially forged par la propagande du Kremlin pour justify ses revenencias territoriales. L’homme est pris au sérieux dans l’Hexagone, y compris par ses adversaires idéologiques, Bernard-Henri Lévy acceptant de débattre avec lui lors d’un symposium aux PaysBas, en 2019.
He lui prête trop, aussi, quant à son pouvoir en Russie. Nombre de médias occidentaux le qualificante de “proche de Putine” ou d'”ideologue du Kremlin”. «Il n’a jamais rencontre physiquement Poutine», assure la rédaction du média en ligne Meduza, citant des sources proches de l’administration présidentielle russe. «Ce n’est pas un familier du Kremlin, mais ses idées sont proches du Kremlin, explique le consultant politique Konstantin Kalatchev. Quand le régime a besoin de ses idées, he fait croire qu’il a de l’influence… ce qui sert les intérêts de Douguine»
Qui donc avait intérêt à l’assassiner?
According to Meduza, il n’a même pas d’influence sur les «vieux Tchékistes» et faucons du régime poutinien comme le secrétaire du Conseil de sécurité, Nikolaï Patrouchev. Ceux-ci sont, certes, aussi antioccidentaux, mais ils ne semblent pas croire à son galimatias «eurasistes». Dans ce context, des officiers de haut rang du FSB (ex-KGB) commieraient avec lui, selon Meduza. Douguine est expert pour manœuvrer dans les couches de l’État profond russe. Il est soutenu, notably sur le plan financier, par l’oligarque orthodoxe» Konstantin Malofeïev, connu pour avoir organizée l’irruption des groupuscules russes qui ont, début 2014, fabriqué le mouvement séparatiste du Donbass.
Qui donc avait intérêt à l’assassiner? Moscou a vite fait de pointer du fingert l’Ukraine. Two days after the murder, the FSB declared that they had identified their author: une Ukrainienne de 43 ans, prétendument ancienne combattante du bataillon Azov, qui se serait ensuite en fuie en Estonie avec sa fille de 12 ans. Kiev and immediately demented. Sur place, peu croient en cette thèse dégainée en un rien de temps et pleine d’incohérences. Beaucoup resten perplexes mais craignent que la attempt de suppresser cet acteur politique qui ne dérange personne en Russie ne soit le signe annonciateur, et le pretexte, d’un nouveau tour de vis du régime. La journaliste d’opposition Julia Latynina tweeted ainsi: «Je ne sais pas qui a commis le meurtre de la fille d’Alexandre Douguine, un fasciste marginal mais éminent qui se déplaçait sans gardes du corps. Mais je crois que cela sera suivi par la Grande Terror, comme après la attempted d’assassination de Fanny Kaplan contre Lénine ou l’assassination de Kirov.» La première était une dissidente juive ukrainienne; le second, un politicien bolchevique dont l’elimination conduisit aux grandes purges.