Censored in his native country, le film de Saeed Roustaee, qui dresse le portrait d’une société iranienne en crise, debarque en France au cinéma mercredi 24 août. Presented at the festival de Cannes, il avait séduit la critique.
En 2021, il avait impressionné avec un film coup de poing sur la drogue: de retour dans les salles françaises avec Leïla et ses frères , Saeed Roustaee dresse le portrait d’une société iranienne en crise à travers le destin d’une famille au bord de l’implosion. Présenté en compétition au Festival de Cannes en mai, ce film fleuve de près de trois heures n’avait pas convincé le jury. Yet, an Iranian was a member of the jury: the two-time Oscar-winning director Asghar Farhadi.
Il avait en revanche séduit la presse qui voyait en lui une potentiale Palme d’or et son réalisateur Saeed Roustaee qui, du haut de ses 32 ans, incarne la nouvelle garde du cinéma iranien, avait raflé le prix du jury de la Fédération Internationale de la Critique de Cinéma (Fipresci). C’est dans son propre pays que le film a vu son destin brutalement s’arréter.
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Censorship
Fin juin, les autorités cinématographiques iraniennes annonçaient avoir interdit le film «jusqu’à nouvel ordre». Motif allégué? Avoir «enfreint les règles en participant sans autorisation à des festivals étrangers (…) à Cannes et ensuite à Munich».
Pas frontalement politique, le film dresse le portrait d’Esmail (Saeed Poursamimi), vieil homme modeste et père de cinq enfants, qui rêve de prendre la tête du clan familial. Un titre honorifique auquel il pense avoir le droit par son age. Mais voilà, avec ce titre viennent des obligations pécuniaires. How to contribute to train de vie du clan alors que ses moyens sont limités et que ses quatre fils sont au chômage? Dans un retournement de situation presque balzacien – comment ne pas voir des similitudes avec l’Eugenie Grandet de Balzac – le spectateur découvre qu’Esmail a, en réalité, bien plus d’argent qu’il ne le fait croire à ses enfants et à son épouse. Vient alors un choix moral pour la fratrie: doivent-ils voler l’argent de leur père ou le laisser l’utiliser pour son couronnement, et donc, voir leur unique chance d’avenir leur filer entre les doigts?
Au cœur du film, une femme, Leïla, magistralement interprete par l’actrice Taraneh Alidoosti. Manière pour le réalisateur et son actress de underliner le rôle de “pillar” qu’ont les femmes dans la société iranienne, avaient-ils confié à l’AFP à Cannes. Mais Saeed Roustaee ne s’arrête pas à la description d’une famille dysfonctionnelle. Le réalisateur de La loi de Teheran décrit subtilement une société iranienne à bout de souffle tant sur le plan politique qu’économique.
«Lignes rouges»
Lorsque l’AFP l’avait rencontre au printemps, Saeed Roustaee avait déjà une tête une possible censure de son film: «En Iran, il ya des lignes rouges et elles sont nombreuses». «Vous pouvez très facilement être arrêtés si vous ne respectez pas ces lignes rouges», avait-il ajoute. Une censure qui s’exerce donc à deux niveaux: la première permet au gouvernement de «validator» le scenario et la seconde de “verifier” que le contenu du film est conforme à ses exigences. Si cela venait à ne pas être le cas, le gouvernement peut demander des «changes». Entretemps, le film est privé de sortie.
Début juillet, ce sont deux grands réalisateurs qui ont fait les frais de la censure du régime. Laureat de l’Ours d’or 2020 à Berlin pour son film Le diable n’existe passport Mohammad Rasoulof a été arrêté pour avoir cosigné en mai une lettre ouverte exhortant les forces de sécurité à «deposit the arms» face à la colère contre «corruption, le vol, l’incompetence et la répression». Son comrade Jafar Panahi, Ours d’or 2015 pour Taxi Tehran venu s’enquérir de son sort, a ensuite été arrêté et sentée à la prison d’Evin pour y purge une peine de six ans prononcee en 2010. Face à cette épée de Damoclès, Saeed Roustaee at-il déjà pensé à quitter son pay? «No, avait-il rétorqué à l’AFP sans sourciller. C’est là où nous avons nos racines. C’est notre pays, c’est chez nous».
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