Le vinyle.Un support musical oublié devenu un trophye de chasse qui peut avoisiner les milliers d’euros. Dormant autrefois dans les graniers comme le souvenir d’une époque passé, il est aujourd’hui un objet convoité par toutes les générations. Dans les grandes enseignes, chez les disquaires, dans les brocantes ou sur internet : le vinyle est partout et son prix ne cesse d’augmenter. La faute à une demande embouteillée et à des rendeurs peu scrupuleux. Petit tour d’horizon du marché du vinyle et de ses speculators.
Délaissé par le grand public à l’arrivée du CD il ya precisely quarante ans, le vinyle connaît depuis plusieurs années un regain d’intérêt. According to the Syndicat national de l’édition phonographique, en 2021 le vinyle représentait 33% des ventes physicales avec plus de 5 million d’unites vendues et se plaçait en troisème position des revenus, en hausse de plus de 50%.
Depuis 2016, le marché du disque, porté à 51% par les moins de 35 ans, ne cesse de progresser. “En France, he a des jeunes qui streament et achètent des vinyles. Ils ont un engagement plus pronounce envers leurs artistes. Et j’imagine que c’est parce qu’ils sont beaucoup plus connectés et proches d’eux grâce aux réseaus sociaux”, décrypte Paulin Pigorot, responsable des études au sein du SNEP. Au poster accroché sur les murs de leur chambre d’ado, la jeune génération préfère aujourd’hui le vinyle.
Et qui dit nouveaux consommateurs, dit augmentation de la demande face à une ofre encore trop faible. Et comme pour la majority des produits, lorsque la demande dépassé l’offre, le prix augmente. En 2021, trois majors françaises (Sony, Universal et Warner) ont majoré les tarifs d’une partie de leur catalogue, faisant ainsi augmenter les prix hors taxe de plus de 19 euros pour certains. Ainsi, le vinyle de Téléphone Dur Limit serait passé de 12.49 euros ex-tax à 30 euros ex-tax, selon le syndicat Le Gredin (groupement des disquaires indépendants français).
Pour justify cette flambée des prices, les majors ont dégainé la carte de l’augmentation des costs des matières premières, notably les polymers serving à la fabrication de la galette noire. Une inflation constatie par Alexis Castiel, co-fondateur du site Diggers Factory mettant en lien artistes et fans pour presser des vinyles à la demande, et qui s’est accompaniede d'”une pénurie sur des matières premières comme le carton”.
A cela s’ajoute le manque d’usines capable de réponder à une demande de production importante. En France, les entreprises M Com’Music ou Vinyl Records Makers ne font pas le poids face au géant GZ, qui concentre 32% de la production mondiale. Mais ce simple ralentissement de production s’est transformé en réel embouteillage lorsque la manufacture californienne Apollo Masters, l’une des deux usins qui fabriquent de la laque indispensable à la confection d’un disque vinyle, a brûlé en février 2020. Alors les places sont chères, et les petits indépendant labels qui veulent presser leurs disques doivent s’armer de patience face aux mastodontes de l’industrie musicale qui commandent des milliers d’exemplaires.
Pour autant, ces tarifs n’empêchent pas la clientele de se bousculer au portillon, bien au contraire. En quelques années, les majors ont fait du vinyle un véritable objet de collection avant d’être un support musical. Ce qui explique pourquoi selon une enquête de 2016 comandée par la BBC à l’ICM Unlimited, 48% des Britanniques ayant acheté un vinyle dans le mois précédent ne l’ont pas écouté. Appâtés par un discours marketing bien rôdé, les fans sont prêts à mettre le prix pour se procure une pièce de collection les rattachant un peu plus à l’univers de leur artiste préféré.
“Il ya plein de campagnes marketing qui sont mises sur Instagram, Facebook et TikTok pour développer et engage l’audience de l’artiste. On le voit notably avec les opérations de merch qui sont mises en place lors de la sortie d’un nouvel album”raconte Paulin Pigorot en prenant pour exemple l’opération marketing autour de la sortie du dernier album du rapper Orelsan. “On voit bien via ce type d’opération que les links que les artistes créent avec leur fanbase permettent de maintainer et de faire évolue le marché du physique et du vinyle”.
Pour la sortie de Civilisation, le rapper avait édité 15 versions exclusives de son album en vinyles, chacune decorée de visuels uniques. En huit heures, le site avait écoulé ses 22,500 exemplaires à 38 euros pièce, provoquant ainsi l’agacement de certains internautes. According to the SNEP, online sales alone represent 1/3 of physical revenue, or 63 million euros, of which 6 million come solely from artists’ boutiques.
Heyyyy Les éditions limitées sortent envin en vinyles ✨ C’est en vente à partir de main demain 10h ✌Merci d avoir attendu ✌il ny en a que 1500 de chaque. Rdv sur https://t.co/LrrjhmQdxa pic.twitter.com/5dytZ6Ihx0
— OrelSan (@Orel_san) May 10, 2022
“Le côté exclusif du produit est mis en avant pour pousser les gens à acheter parce qu’ils ont peur de passer à cote”, estime Victor, digger (collectionneur) et créateur du compte Le Hip-Hop en vinyle. Plus recently, le duo Caballero & JeanJass a fait l’impasse sur le streaming en sortant l’album SushiBoys only on vinyl in limited edition. Comme souvent, il fellait précommander le disque sur Internet avant sa sortie. Mais au bout de cinq minutes à peine, le site dédié, noyé sous un million de requêtes, ne fonctionnait plus. “Ceux qui ont réussi à en avoir essayent déjà de le revendre à prix fort parce qu’ils savent qu’il ya un certain engouement, pursue le jeune homme. La demande augmente, mais il n’y pas assez d’exemplaires sur le marché pour y réponder. Et ça les speculators l’ont bien compris”.
.@zushiboyz Vol.2 en chiffres c’est :
: 1 million requests on the site in 5 minutes
: 170 sales/minute
: Un pic à 600 ventes/minute
: Sold out in 14 minutesWell done @caballerobxl & @JeanJass !! pic.twitter.com/IQq8IkM7EU
— Diggers Factory (@DiggersFactory) July 29, 2022
Dans le sector du vinyle, les speculators font grincer des dents. Quand he évoque le sujet, Francesco, disquaire et propriétaire de Music Avenue Paris dans le 11e arrondissement, départure au quarter de tour. “Moi, je prefer vendre à un collectoreur, à un gars qui mixe ou qui va écouter chez lui. Pas à un pseudo-investisseur”. Derrière le comptoir couleur pétrole de sa boutique de vinyles, Francesco s’agite. Le disquaire vient de refuse une vente sur le site Discogs, une platforme dedicated aux supports musicaux. “Le mec voulait me le prendre pour 70 euros, je suis allée sur son profil, j’ai su qu’il achetait pour revendre plus cher diremente après. C’est cuit pour lui!”souffle le quinquagénaire en remontant son masque qui avait glissé pendant son énergique récit.
Utilisée à l’origine comme une base de données musicales pour acceder à des discographies, Discogs est depuis quelques années une place de marché sur laquelle les utilisers dictate la cote du vinyle. Comme on consulterait l’argus before l’achat d’une voiture, Discogs permet par exemple à un potential acheteur de vinyles de verifier la raisonnabilité des prix proposés par un disquaire. Sauf qu’en réalité, la plateforme abriterait un phénomène de speculation auquel elle ne semble pas forcément vouloir mettre fin. “Depuis qu’ils ont créate le site, ils sont aux abonnés absent”, fustige Victor du compte twitter Le Hip-Hop en Vinyle. The site, qui touche 8% de commission sur chaque vente, pourrait probabilite profiter de cette tendance. Contacté par Franceinfo, le site n’a pas donné suite à notre demande d’interview.
Dans le jargon des habitués du site, ces acheteurs/spéculateurs sont surnommés les sharks (requins). Leurs proies : les acheteurs compulsifs ou whales (baleines). “Les sharks ont leur marché assureur parce que les whales sont nombreux sur Discogs”, métaphorise Roméo, doctorant de 27 ans et collectorneur de vinyles. Pour parvenir à leurs fins, ces requins du commerce 2.0 du vinyle regorgent de méthodes : faux acheteurs pour faire monter artificiallement la cote d’un des disques mis en vente sur leur profil, copies déguisées ou encore faux commentaires pour faire creire que le disque a été played by a famous DJ.
Mais parfois peu d’efforts suffisent pour que ces prédateurs fassent bonne pêche. “Je me souviens avoir vendu des disques à 15 euros. Le surlendemain, je les retrouvais sur Discogs à des tarifs largement supérieurs. Des fois, c’était 10% d’augmentation, d’autres fois 500%”, témoigne Nicolas Williart du label de métal français indépendant XENOKORP. Le temps de pressage étant plus long pour les labels indépendant, les sharks en profitent pour faire augmenter la cote du vinyle le temps qu’il soit repressé. “Nous, ça a changé notre façon de proceder, on vend au même tarif sur le site web, mais ils nous est arrivé d’en garder une dizaine d’exemplaires sous le bras et de le revendre deux, trois ans plus tard au prix qu’il y avait sur Discogs”avoue le manager de label.
Le problème, c’est qu’en acting de la sorte les speculators font monter artificiallement la cote d’un vinyle pour le déguiser d’une certaine rareté et ainsi, le rendre encore plus désirable. “J’ai un parfait exemple. Au lendemain de la mort de David Bowie, tous ses disques ont pris de la valeur parce que les gens voulaient absolument en avoir un. Dans le magasin j’avais des pressages que je vendais à dix euros. Étant donné qu’ils n’était pas rares, ils ne valaient pas plus que ça.“, confie Francesco, le disquaire. Car en théorie dans la vente du vinyle de seconde main, plus le vinyle est difficile à dégoter, plus il est cher.
Pour Mr Vinyle, youtubeur français qui a created sa chaîne en 2015 pour parler de sa passion pour la galette noire, la rarity ne justifie pas ces cotes exorbitantes. “L’idée reçue de se dire c’est rare c’est cher, ça vient de Discogs et du fait que la platforme affiche des prix médians. Entre collectorneurs avec un peu d’expérience, on sait pertinemment que la vraie cotation n’ est pas celle d’Internet”, dit-il. Le passionné raconte être tombé sur le disque Smile de Michael Jackson, rather recherché des collectors. Il était alors proposé dans les 200 euros sur eBay. Pourtant, dans les quotations, le vinyle en très bon état avoisine les 1,500 euros. “Quand on connaît un petit peu, on sait qu’on peut tomber sur le vinyle à un prix bien moins élevé que ce que la cotation Discogs propose”.
Bien que Discogs soit un outil très pratique et complet sur le référencement des vinyles, le spécialiste conseille de priviliger les rapports humanas et d’aller à la rencontre des disquaires pour ne pas se laisser aveugler par un écran de fumée. Sur sa chaîne YouTube, Mr Vinyl se charge de faire de la prevention en ciblant mainly la jeunesse dont le manque d’expérience peut parfois faire défaut dans le milieu. “Il est nécessaire d’être dans cette prevention. Sinon on va tomber dans une collectnite, un syndrome Panini [maison d’édition de vignettes à collectionner ndlr] , qui peut devenir toxic et dangereux. Je leur dis toujours: privilegez la qualité à la quantité, soyez dans la musique, pas dans l’objet.”